12 décembre 2005

Le sens du détail


Un matin en fermant la porte de chez moi, j’avais l’impression que j’avais oublié ma montre, j’ai vérifié et elle était là où elle devait l’être. Je ne fais jamais attention à ce détail, c’est devenu un acte machinal, une habitude, une seconde nature me dit on,. avant de sortir je la mets, en arrivant au bureau de la dépose, je la reprends pour la pause du midi, pour la déposer une autre fois à mon retour, je la file en sortant pour l’enlever à mon arrivé, je sais pas depuis combien de temps dure ce rituel, mais j’y ai jamais fait attention. Avec un peu de recul j’ai découvert que toute ma vie est ponctuée par ce genre d’habitudes. Je ne fais jamais attention quand je brosse mes cheveux, quand je chauffe le lait le matin, quand je glisse qqs biscuits dans mon sac pour finir mon petit dej dans le train, quand je prends bon badge pour la cantine … pourtant ma vie est faite de ces détails là.

A ce moment je sais pas qu’elle mouche m’avait piqué, peut être celle du « t’sais t’sais » qui fait raisonner dans la tête cette question si pressante « t’sais combien de temps s’est écoulé dans ta vie sans que tu y prête attention ? » Je me suis rué sur mon appareil photo, et je me suis mis à photographier tout et n’importe quoi à figer les détails de ma vie, dans une tentative désespérée pour rattraper le temps perdu, maintenant j’ai tout sur un bout de mémoire, mon chez moi, mon petit déjeuner ma brosse, ma montre je suis sorti, avec une seule obsession : immortaliser tous les détails de ma vie, vivre, enfin, prendre le temps pour acquérir le sens du détail. J’ai décidé de surveiller la marche du temps, désormais il n’arrivera plus à me surprendre. Je me baladais dans les rues de Grenoble, la ville qui m’accueille depuis presque six ans, le son du flash rythmant mes pas, désormais j’obéis plus à la loi de l’utilité, celle qui a pour longtemps dicté mes trajets, je choisis plus l’itinéraire le plus court, celui qui me permet d’éviter la foule, ou je pourrais trouver un distributeur ou une boulangerie, mais je me fie à mon instinct, cette espèce de sixième sens. C’était la période d’avant Noël, il’y avait un marché comme chaque année, je n’ai jamais été dans un marché de Noël, à chaque fois l’odeur du vin chaud et toutes sortes de charcuteries à la Française me faisait fuir, j’ai décidé de m’y aventurer, après tout il se peut qu’un bout de ma vie y soit. Il y ‘avait de tout, des stands de vins, de fromages, de jambons, des chéquiers, de l’artisanat roumain russe maghrébine africaine, des petits bouddha souriant avec leur grand ventre, des ballons, des sucreries, des artistes de rue, des étoffes venus d’ailleurs, des épices, il ’y avait de tout et du n’importe quoi. Je me suis laissé allé pour un moment et puis-je me suis aperçu que je n’ai pas entendu le son du flash depuis plusieurs minutes. Avais-je perdu mon sens du détail, avais-je repris mes vielles habitudes, non pas la mouche « t’sais t’sais » une deuxième fois ! j’étais fatigué, j’avais envie d’aller au petit coin, il faisait froid et j’avais oublié mes gants, j’ai déposé mon corps sur un banc publique, je voulais jeter un coup d’œil sur les images que j’avais prises, sur ces bouts de ma vie, il’y avait des prises des places , fontaines, facades d’immeubles, boulevards, quelques stand, le tram, le petit train pour touristes, Dar el shisha … mais il manquait quelque chose, on avait modifié mes photos, c’était pas mes photos, peut être les objets sont les mêmes, mais il manquait quelque chose, moi, ma vie . Mais bien sur la vie n’existerait pas sans le regard qu’on pose sur elle certes, mais ce regard ne suffit pas, ce que mon appareil photo n’a pas pu capter c’est l’intérêt que chaque objet suscite en moi, ce moment d’émerveillement, cet instant ou on redevient enfant ou tous nous est inconnu et intéressant. Comme quoi il faut de tout et de rien pour faire une vie, le temps tue, le temps nous rend vieux non pas par ce qu’il use notre corps mais par ce qu’il nous vole notre enfance, par ce qu’il nous donne l’illusion d’avoir assez vécu et que plus rien ne nous étonnera, il faut lutter contre le temps, il faut savoir capter l’âme de la vie , il faut sortir de son cocon il faut se laisser surprendre !

Oups le démon de la bêtise a encore frappé :p J’essayerais de mettre les photos en question en ligne , bien sur dès que j’aurais assez de temps et de maîtrise pour le faire :p

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Thouma j'adore ce poste! j'adore ton style et ca ne m'etonne pas de tomber sur d'aussi belles choses sur ton blog :)

Bon pr ce qui est des photos, je crois ue c'est memoriser ces petits instants, feelings et ce souvenir qui suscite en nous tt cet emoi

Anonyme a dit…

un trés beau texte hatchoum,sincrement t'as réussi a me faire entrer dans ton univers, étant moi meme photographe amateur, j'attendais avec impatience l'instant ou tu vas réaliser qu'il manquait quelque chose!
encore félicitation pour ton excellent blog que je découvre a l'instant!